Le Sénégal atteindra-t-il une éducation qui réussit ’’ l’école d’excellence’’ ? En tout, la réalité à Mbour n’inspire pas des idées optimistes. Les écoles du département sont dans un déficit chronique de matériel, de salles de classe et d’enseignants, intrants indispensables pour bien mener la mission du service public et hisser l’éducation nationale vers les sommets de l’excellence.
Dans le département de Mbour, avoir une « école d’excellence » semble être une utopie, vu les conditions dans lesquelles fonctionnent les établissements scolaires. Le manque est criard en ce qui concerne beaucoup d’intrants dans la recherche de l’excellence. Mamadou Diouf, planificateur de l'Inspection de l’Education et de la Formation de Mbour 1, chargé des statistiques, du suivi- évaluation et point focal aussi des constructions et de l'équipement scolaire, estime à ce titre, « l'éducation d'excellence, c'est le vœu de chacun. Je pense que c'est un objectif que se fixe chaque IEF. Et, on est toujours à la quête de cette excellence qui ne sera jamais atteint à 100% parce que, l'excellence que nous voulons, c'est d’avoir 100% de réussite de nos élèves. Mais, on peut dire que chaque année on fait des progrès malgré les difficultés des enseignants, tables-bancs, manuels etc… Ce sont des intrants de qualité de première nécessité parce qu’une école doit avoir des classes, des tables-bancs et de bons enseignants. Si seulement ça c’est réglé, il restera de mobiliser ces équipes vers l'excellence que nous n’avons jamais atteint même si que nous pourrons toujours améliorer. »
Le Département compte plus de 200.000 potaches régulièrement inscrits qui sont répartis en 2 Inspections de l’Education et de la Formation (IEF). Selon M. Diouf, « par rapport à l'équipement scolaire, je pense que c'est actuellement la graine rare au niveau des établissements. On a eu même des programmes de constructions qui ne sont pas accompagnées d'équipements et actuellement le déficit en tables-bancs, si on le prend en moyenne par école ça peut être au moins 200 à 300 par école et si on le prend globalement au niveau circonscriptions nous on est à près de 30.000 à 40.000 tables-bancs qui aujourd'hui ne satisfont pas complètement le déficit pour l'IEF de Mbour 1. » A en croire le responsable des statistiques, l’inspection de Mbour 1 est composé neuf communes que sont de la commune de Mbour, de la commune de Saly, la commune de Ngaparou, de Somone, de Popenguine, Ndayane, de Nguekhokh et les communes rurales de Sindia, de Malicounda et de Diass « l’effectif par rapport à l'élémentaire est à peu près 80.000 élèves, pour le moyen secondaire à 60.000, et pour la petite enfance à 60.000. Donc, ce qui fait un effectif global d'à peu près de 200.000 à 210.000 élèves pour l'IEF de Mbour 1 répartis sur 300 établissements scolaires ». Et pour cette population scolaire, le déficit en matériel scolaire a été signifié aux autorités éducatives. « Le déficit, on l'a présenté il n’y a pas longtemps. C'est une commande du Ministère de l'Education parce qu’on est à l'ouverture. Ainsi, on a reçu la commande et on a dit pour l'élémentaire nous sommes à 15.800 tables-bancs, pour le moyen secondaire on est à 10.000 et quelques, et la petite enfance ça fait maintenant des années il n’y a pas eu de programme, ni de construction, ni d'équipements. Souvent, laisse-t-il entendre, il y a l'apport de la Case des tout-petits mais, pour le département dans l'enseignement préscolaire, on n’a pas reçu d'équipements scolaires », indique Mamadou Diouf. Dans la même lancée, il informe que par rapport aux manuels scolaires, la difficulté se situe au niveau des écoles. Parce que « vous recevez une dotation mais il y a, des élèves qui augmentent l'année suivante et il y a aussi les niveaux qui augmentent souvent dans certaines écoles comme les écoles à cycle incomplet pour l'élémentaire. En fait, on a un déficit aussi de livres malgré les programmes de dotation des trois dernières années. Donc, au niveau des écoles, on reçoit des commandes par rapport à la disponibilité de livres pour pouvoir assurer les enseignements apprentissages de qualité. » Dans le même sens, il note une certaine incongruité dans la ville de Mbour qui contient encore des abris provisoires. « Mbour est la ville qui cache un peu les abris provisoires. A voir Mbour, vous pensez qu'il n'y a d'abris provisoires mais, dans les grandes écoles de Mbour vous en trouverait. En tout cas, au moment où je vous parle, en dehors du programme de remplacement d'abris provisoires qui est entamé et qui a réalisé une trentaine de salles de classe, on est aujourd'hui à un déficit de près de 40 classes qui sont actuellement en abris provisoires dans la circonscription et dans la commune de Mbour on a une quinzaine d'abris provisoires dans de grandes écoles comme Serigne Saliou Mbacké, Santhie 2, Mbour Serere Kaw ... », le point focal des constructions et de l’équipement scolaire.
Allant dans la même dynamique, Mamadou Diouf fait savoir, « on a encore un déficit d'enseignants. Je travaille en nette collaboration avec le responsable des ressources humaines mais, on fait souvent des gymnastiques pour pouvoir satisfaire certaines localités en enseignants. Donc, c'est souvent les multigrades à effectif élevés qui sont érigés parce qu’une multigrade, si ça atteint trente élèves par classe, c'est pratiquement ingérable. Mais, précise-t-il, il y a toujours un déficit. Je ne pourrai pas vous donner tout de suite le nombre mais quand même Mbour aurait besoin au minimum d’une vingtaine d'enseignants pour l'élémentaire, pour le moyen également, j'ai assisté à beaucoup de rencontres où il y a des professeurs qui manquent comme les professeurs d’EPS, de Mathématiques. Avec l'Inspection d’Académie, le décompte pourrait atteindre aussi 15 professeurs par matière. » Par contre, ajoute le planificateur de l’inspection, « au niveau du préscolaire y a une stratégie qui permet de cacher ou de combler ce gap. C'est l'utilisation des communautaires. Souvent, quand le préscolaire est dans le milieu, s'il n y a pas assez d’enseignants, on tire du milieu et on les forme. Alors, il y a la contribution des parents qui permet de les prendre en charge. »
L’IEF de Mbour 2 par contre est une inspection rurale qui polarise les 7 communes de Ngueniéne, Joal, Sandiara, Fissel ,Ndiaganiao, Sesene et Thiadiaye où sont dénombrées à peu près 100 et quelques écoles publiques comme privées constituant un réseau scolaire très dense. Selon Mamadou Moustapha Kane, Inspecteur de l’Education en service à l’IEF Mbour 2, comme toutes les écoles avec la massification, l'élargissement de l'accès et les résultats enregistrés l'année dernière au niveau du CFEE et du BFEM, il y a un rush au niveau des effectifs. « En plus, maintenant avec les conditions imposées par le protocole sanitaire où on n'a plus droit à mettre beaucoup d'élèves sur la même table, cette année on a eu des problèmes de tables-bancs parce qu’il nous faut gérer les dispositions sanitaires prises. Raison pour laquelle, on est obligé d'aérer les salles de classe et de mettre quelques tables-bancs. Cela a affecté certains établissements et a créé même un déficit en tables-bancs. » Pour les salles de classes, il indique qu’elles dépendent des zones et du fait qu’il y a une forte population scolaire ou non. « Je donne l'exemple de la commune de Ndiaganiao où il n’y a qu'un seul Collège d’Enseignement Moyen et un lycée qui polarise beaucoup d'établissements. Ce CEM a eu d'énormes difficultés mais, heureusement que dans la dotation, il a été prévu. Donc, c'est pour dire que ça dépend des zones. » D'ailleurs, poursuit-il, « dans certaines zones, l'effectif n'est pas important mais, dans les zones dont l'effectif est important comme Ndiaganiao, Jaol et Thiadiaye, nous avons des problèmes de classes physiques avec les inondations parce que dans certains lieux, on ne peut pas ériger de constructions. C’est le cas de Jaol qui est aussi débordé au niveau du foncier, c'est ce qui fait qu'il y a des problèmes. »
Mamadou Moustapha Kane renseigne également, « qu’au niveau du corps professoral et du personnel, de manière générale, depuis quelques années, on a gelé les affectations dans les régions de Thiès et Dakar. Donc, une partie du personnel provient du mouvement national et régional et au niveau de Mbour 2, nous sommes une zone de départ, pas une zone d'arrivée. Les gens quittent pour aller à Mbour commune. Ce qui affecte souvent le personnel. Donc, nous avons un déficit actuellement au niveau des collèges et même dans les établissements scolaires élémentaires. » Dans le même sillage, fulmine l’inspecteur, « à part les tables-bancs et le déficit en personnel, il y a également les difficultés liées à l'état civil. Cette question est récurrente et revient toujours sur la table car beaucoup d'enfants ne sont pas déclarés et on est obligé de faire composer les élèves sans pièce d'état civil. Ensuite, explique-t-il, le manque de ressources constitue aussi un problème. « Les écoles fonctionnent difficilement parce que des fois, il y a des retards dans le crédit de fonctionnement. Ce qui fait qu'elles n'arrivent pas à gérer certaines difficultés. »