Présentez-vous :
Je m'appelle Cheikh Barro. Je suis pêcheur et j'habite à Golf et je faisais partie de la pirogue qui avait échoué à Nouadhibou. Je peux vous dire que la pirogue transportait environ 100 personnes et 25 sont survécu
Qu’est-ce qui vous à pousser pour que vous faite l'immigration clandestine ?
Ce qui nous a poussés, c'est que la mer n'a plus de travail. Quand tu achètes du matériel à un million et quelques tu vas à la pêche et n'amènes rien malgré tes dépenses et autres frais nécessaires. Dés fois, on est même obligé de chercher encore à y rajouter quelque chose pour compléter la dépense quotidienne. C'était très difficile pour nous. Partir par les pirogues est plus facile que de partir par la voie normale. C'est pour cela que certains contractent des dettes pour partir, pour d'autres c'est leur mère qui leur a donné de l’argent. Moi, j'ai vendu mon matériel à 600000f la machine seulement.
A combien tu l'avais acheté ?
Je l'avais acheté en occasion à Yoff à 875000. Quand j'ai voulu partir, je l'ai vendu à 600000f
Combien tu as payé pour ton voyage ?
Sur la pirogue, j'ai donné 80000f. M,ais, dans la première pirogue on m'avait arnaqué. J'avais alors donné 350.000f parce qu’il y avait des problèmes et par la suite, j'ai plus entendu parler de la personne à qui j’avais remis mon argent. Mais, il est toujours à Mbour.
Maintenant, dans le voyage qu'est ce qui est à l'origine des problèmes et des accidents ?
Dans notre pirogue tout était OK. L'essence était pleine de 100 bidons et quelques. Il y avait aussi de l'eau à suffisance. On a fait le voyage de 2 jours à 4 jours il n’y avait aucun problème : on mangeait et on buvait correctement. Mais, durant ces 4 jours on ne voyait plus les 30 bidons et les sachets qu'on avait réservé.
C'était fini ?
Non, on ne les avait juste plus vus alors que tout était dans la pirogue. On a cuisiné pendant 4 jours et, un beau jour, on n’a plus rien vu. Les personnes commençaient à avoir faim et soif. On leur donnait maintenant de l'eau de mer et certains commençaient à mourir. Si quelqu’un meurt le matin, on attend jusqu'au soir pour jeter le corps à la mer.
Qu'est-ce qui les faisaient mourir ?
C'est la faim et la soif. Dans la pirogue, il y avait les "adior-adior". On leur donné à manger et ils restaient très calme dans un coin. Il y avait également des personnes d’autres ethnies et le soir leurs femmes venaient dans la pirogue.
Vous aviez amené des femmes avec vous ?
Non.
D’où est ce qu'elles viennent donc ?
C'était ça le problème. On ne sait même pas. Ils faisaient n'importe quoi dans la pirogue. Certains arrivaient à les voyaient mais d'autres non. Moi, quand on a fait 3 jours de voyage, j'ai dit au capitaine qu’il y avait d'autres personnes intruses dans la pirogue parce que, quand je me couchais, de là où je posais ma tête, j'entendais des hurlements de personnes. Par la suite, la situation a pris des proportions qui nous ont dépassés. Il y avait une personne qui se nomme Andaw. C’était un jumeaux lebou. Il y avait quelque chose qui lui montrait que quand les sorciers allaient aux toilettes, c’était des gris-gris qui sortaient. Dès lors, si on ne faisait pas quelque chose contre les adior, s’ils ne descendaient pas de la pirogue, on n’arriverait jamais. On a alors pris les gris-gris et on les a mis devant un adior-adior. Il ne voulait pas les voir car, il m'a dit que s’il les voyait, il allait descendre de la pirogue et s’envoler. Andaw a dit de le laisser parler avec eux. Il y va et laisse les gris-gris par terre. Ils étaient environ 7 personnes. Il a parlé avec et certains d'entre eux ont voulu l’étrangler avec une corde pour le tuer. Là, on a allumé une torche et leur dit d'arrêter parce que : ’’si on vous a envoyé pour nous faire du mal, cette personne c'est nous qui l'on envoyé laisser le tranquille’’, leur dit-on. Alors, on leur a dit de discuter entre eux pour trouver une solution rapide, sinon nous allons les tuer. Finalement, on les a attaqués. A la première rangée, il y avait un adior qui s'appelle Touré Bâ, mais qui n’était pas avec eux. Celui avec qui il était monté à bord, a rendu l’âme très tôt. On a vu des gens qui tranchaient des oignons, après ils ont coupé une partie du nez et de l'oreille de cette personne, on les a vu manger ces parties du corps de l’homme. Certains pleuraient même. Après, on les a tous attaqués et les a jetés dans la mer. C’est après que la pirogue a recommencé à voguer normalement. Et juste avant le dernier virage pour arriver en Espagne, sur l'île, la pirogue ne pouvait plus bouger. Ils mettaient leurs mains sous la pirogue, dans l’eau, pour l'empêcher de bouger. On voyait que le moteur de la pirogue s'arrêtait. Quand on a essayé de le déclencher, la pirogue a reculé de presque 80 km dans la mer. Pourtant c’était une machine neuve. L'autre machine de secours, on l'avait dépiécée et réparée à 300000f. C’est, du reste, cette ancienne machine qui nous a amenés jusqu'en Espagne. On avait gardé deux de ces sorciers parce qu’on ne voulait pas les tuer. Mais, ce sont ces deux personnes qui nous ont retardés sur le chemin. Ils ont continué à faire ce que les autres nous faisaient au paravent. Finalement, on les a jetés dans la mer. Nous avons vogué jusqu'à trouver des bateaux pour demander de quoi manger et boire mais, malheureusement, les bateaux nous arrosaient avec de l'eau pour qu'on chavire. En plus de cela, les monstres qui voulaient nous manger. Un passager qui venait de Guet Ndar, nous dit qu’il reconnaissait Nouadhibou. Et on est entrés à Nouadhibou.