Pour la première fois de l'histoire moderne du Sénégal, les fidèles musulmans se voient contraints de se confiner chez eux le vendredi à 14h. Cette heure qui, depuis la naissance de l'islam est réservée à la prière collective dans tous les coins et recoins du pays et du monde entier, a été presque morte ce vendredi dans la capitale de la petite côte. Pour cause : Coronavirus.
Les autorités sanitaires du Sénégal avaient demandé à tous les citoyens de rester chez eux pour ralentir, sinon stopper la propagation du Covid 19 dans le pays. Cette mesure qui est passé par là fermeture des écoles et universités, la fermeture de tous les lieux susceptibles d'emmagasiner un grand nombre d'individus, est arrivée sur les lieux de culte. Sur toute l'étendue du territoire, il était interdit toute forme de rassemblement même dans les mosquées et églises. Un tour dans la ville de Mbour a permis à EnQuête de constater de la majeure partie des mosquées de la ville ont fermé leur porte à l'heure habituelle de la prière du Jumha. À Oncad, la mosquée Masdjdoul Hidjaba dirigée par Imam Mouhaded Tall n'est pas en reste. Selon l'Imâm, le respect de cette interdiction est une forme de protection de la population dans un moment aussi crucial de l'histoire du pays et du monde. " Le gouvernement, c'est le pays. On a été en contact avec le préfet, avec les autorités religieuses de la ville et les Imam Ratib. Ce qu'ils nous ont dit est compréhensible et chaque personne devrait en être conscient et en faire bon usage", a estimé Imam Tall. Il indique dans ce sens, " le préfet nous a demandé de nous solidariser aux chefs religieux et de soutenir l'état dans sa dynamique parce que la maladie est devenue une inquiétude pour l'état et sa contagion est rapide". Il ajoute : "C'est pour cette raison qu'on cherche à éviter les rassemblements dans les mosquées. Je l'ai automatiquement accepté et j'en ai informé les fidèles de cette mosquée depuis hier après la prière de Takoussan".
Même son de cloche pour l'Imâm Moussa Leye de la Grande Mosquée de Mbour qui estime que cette interdiction entre en droite ligne avec les recommandations du Prophète Mohammed qui avait demandé qu'en période d'épidémie, d'éviter d'entrer ou de sortir d'une zone infectée. Pour lui, " il faut d'abord préciser que c'est une suspension et non une interdiction. On a juste suspendu les rassemblements dans les mosquées à cause de la pandémie du Coronavirus". Sur ce, " je pense que c'est le prophète qui le premier, a pris des mesures dans le cadre du confinement. Il a dit que quand une pandémie ou une épidémie survient dans un pays, il faut fermer les frontières de ce pays. Donc, c'est lui qui a été le premier à appliquer cette mesure", a expliqué Imam Leye.
Il estime, tout de même, que ces restrictions aurait dû être faites depuis le début la pandémie, avant d'en arriver à la fermeture des mosquées. Les frontières auraient dû être fermées depuis lors. " Et je pense que si cette mesure avait été prises très tôt, le Sénégal n'aurait pas compté de cas importé pour en arriver à cette situation ", a-t-il constaté.
Toutefois, " comme la maladie est déjà entrée, ce qui reste à faire c'est de limiter sa propagation en limitant les rassemblements et les rencontres et cela fait partie de ce l'islam appelle 'hifzoul nafsi' qui veut dire 'la protection de la vie humaine', se résigne-t-il. D'ailleurs, il considère que c'est pour cette raison que Dieu a interdit le suicide. "Donc, personne n'a le droit d'aller dans un lieu où se trouve un danger de mort", a martelé l'Imâm.
Il ajoute, : "Maintenant, comme les médecins et les techniciens ont dit que ce sont les rassemblements, les rencontres, les salutations et autres sont les vecteurs de la propagation de la maladie, l'islam va les conforter dans ces propos puisque si la maladie se propage dans le pays nous serons tous touchés à des proportions insoupçonnées".
Dans la foulée, Imam Moussa Leye précise que la suspension ne concerne que la prière collective du vendredi mais n'intéresse pas les cinq prières quotidiennes puisque ces dernières ne drainent pas autant de monde. Dès lors, " À Mbour, il n'y a pas de prière collective à la Grande Mosquée et beaucoup d'autres parmi lesquels je citerai la Mosquée Sané à Thiocé Est, la Mosquée de l'Imâm Cissé à Oncad, celle de Château-d'Eau", assure-t-il.
Cependant, à la Mosquée Touba Ndiareme également la prière collective du vendredi n'a pas été faite par les nombreux fidèles qui avaient fait le déplacement mais qui ont dû rebrousser chemin après avoir été dispersé par les éléments de la police. Dans ce registre, les fidèles musulmans qui se sont regroupés à la Mosquée de la famille Barro de 11 novembre, ont également dérogé à la règle de restriction puisque qu'ils se retrouvés à la prière à la Mosquée inaugurée récemment par le Président de la République lui-même.