La journée mondiale des océans est célébrée à travers le monde depuis 1992 au sortir du sommet de Rio. Son objectif est de faire du 8 juin de chaque année une occasion de sensibiliser le grand public à une meilleure gestion des océans et de leurs ressources. Au Sénégal, c'est le PAPAS (Plateforme des Pêcheurs Artisanaux du Sénégal) qui a l'a célébrée hier à Joal-Fadiouth. Les responsables en ont profité pour demander plus d'espace dans l'océan.
Depuis quelques années, le secteur de la pêche n'arrive pas à trouver une solution durable aux nombreux problèmes qui le gangrènent. L'Etat cherche sans succès à résoudre ces problématiques mais les acteurs de pêche estiment que ce dernier s'y prend mal. En effet, ils estiment que pour certains préalables sont obligatoires pour un développement de ce secteur. D'abord, indique Abdou Karim Sall, « nous avons choisi un thème très important parce qu'il y a de cela plus de 30 ans, on a avait réservé une zone d'intervention pour la pêche artisanale. En ce moment nous étions environ 3000 pirogues. Aujourd'hui nous comptons 27000 pirogues. La zone était de 7 miles. Ce qui correspond à 12km de profondeur. C'est pour raison que les acteurs de la pêche pensent que la majeure partie des conflits notés dans l'océan est causée par ce problème », a révélé le Président du PAPAS convaincu que les 27.000 pirogues ne peuvent pas partager cette zone sur les 718km de côte du Sénégal. C'est pour cette raison que les acteurs de la pêche artisanale ont célébré la journée mondiale des océans dans la contestation avec des brassards rouges et des pancartes en signe de manifestation de leur colère devant la gestion de l'océan au Sénégal. « Nous voulons que l'Etat du Sénégal relève cette zone à, au moins, 12 miles équivalent à 24km pour permettre à la pêche artisanale de dérouler ses activités tranquillement sans avoir de déboires avec la pêche industrielle. C'est une doléance que nous avons portée depuis des années et on a voulu profité de cette journée des océans pour la réitérer devant l'Etat du Sénégal qui doit comprendre que le monde bouge ». Le Président des pêcheurs artisanaux confie que « le gros des accidents de la mer est causé par cette situation, de même que la raréfaction de la ressource parce plus d'une centaine de bateaux opèrent dans les eaux du Sénégal au moment que les 27.000 pirogues. Toute cette population ne peut cohabiter dans cet espace ». Selon lui, la solution doit provenir de l'Etat du Sénégal qui doit prendre de nouvelles dispositions par rapport à la pêche industrielle. « L'Etat du Sénégal doit d'abord geler les licences de pêche. Ensuite qu'il fasse dans la transparence en révélant combien de bateaux opèrent dans les eaux sénégalaises, enfin qu'on puisse mettre œuvre le FITI (Fisheries Transparency Initiative) au Sénégal puisque cette convention a été signé avec d'autres pays », a exigé le Président du PAPAS. Il ajoute : « il faudrait également que l'Etat du Sénégal arrête les usines de farine de poisson et qu'il annule les licences de pêche de ces usines de farine de poisson parce que c'est cela qui a amené la concurrence avec nos femmes qui travaillent dans les différents sites de transformation des produits halieutiques au point qu'elles ne peuvent plus trouver la ressource ». Enfin, Abdou Karim a plaidé pour l'obtention d'un statut juridique des femmes transformatrices des produits de la mer. « Nos braves femmes travaillent tous les jours depuis lors sans aucune forme de reconnaissance juridique. L'Etat a l'obligation de leur accorder cette reconnaissance puisqu'elles constituent un maillon important dans la chaine de mise en valeur des produits halieutiques », a soutenu M. Sall.
Abdoulaye Ndiaye, pour sa part est allé dans le même sens. A en croire le chargé de campagne océan à Green Peace Afrique, « aujourd'hui il y a une crise que tout le monde constate au niveau des océans. C'est la crise de la rareté des ressources qui est due à une mauvaise politique de pêche qui sont mises en œuvre au Sénégal. Et Green Peace n'a jamais cessé de les décrier ». Il promet de porter « le plaidoyer pour que ces métiers de femmes soient beaucoup plus valorisés mais aussi permettre que les océans soient mieux protégé pour continuer à jouer le rôle qui est le sien, c'est-à-dire de nourrir les sénégalais et au-delà, de nourrir toute la population ouest-africaine ». Il estime que l'Etat doit porter une oreille attentive au discours fort lancé par les acteurs de la pêche artisanale du Sénégal en adhérant à la FITI à l'instar de la Mauritanie. « Il ne faut pas oublier qu'il y a eu un engagement public du Chef de l'Etat en Mauritanie. On a demandé à l'Etat du Sénégal de respecter cet engagement et d'adhérer à la FITI pour plus de transparence. Aujourd'hui quand on parle de l'ITIE (Initiative pour la transparence dans les industries extractives) qui est dans le secteur du pétrole, on se demande comment on peut demander la transparence sur une ressource qu'on n'a pas encore commencer à exploiter au détriment d'une ressource qui nous nourrit depuis bien des décennies », s'est lamenté le représentant de Green Peace. Qui ajoute : « on ne se nourrit pas de pétrole, mais de poisson et de riz. Donc, sur ce qui nous nourrit qu'on doit mettre plus de transparence et montrer aux autorités qu'aller vers la FITI n'est pas une faiblesse mais une marque de grandeur. Sans transparence, il n'y a rien. Et dit-on : ''tout ce qui se fait pour moi sans moi, se fait contre moi », a martelé Abdoulaye Ndiaye.